Au printemps 2017, le nouveau Cabinet de dessins du Musée des Beaux-Arts de Gand (MSK) accueillerait l’exposition Témoignages qui ferait le lien entre la critique sociale de l’artiste espagnol Francisco Goya (1746-1828) et l’engagement social de l’artiste iranienne Farideh Lashai (1944- 2013) dans le cadre d’une véritable mise en cause de la violence et de l’oppression.
Los Desastros de la Guerra
En 2015, le Musée des Beaux-Arts acquert un exemplaire de la suite Los Desastres de la Guerra (Les Désastres de la Guerre) de Goya. Réalisée entre 1810 et 1820, la série de gravures décrit les horreurs de la guerre menée par l’Espagne contre l’occupation des troupes napoléoniennes; elle n’a jamais été montrée en public du vivant de Goya. Œuvrant dans un climat de guerre et d’oppression, l’artiste s’affranchit du discours grandiloquent de la peinture classique, choisissant de représenter non pas les actions d’éclat des héros, mais la lutte pour la survie des citoyens ordinaires.
La suite est considérée comme une dénonciation universelle de la violence sous toutes ses formes.
When I Count, There Are Only You... But When I Look, There Is Only a Shadow
L’artiste et écrivaine iranienne Farideh Lashai a elle aussi œuvré en temps de conflit et d’oppression. Ses dessins et gravures sont un amalgame de paysages pittoresques de son pays natal et de techniques associées à l’art contemporain. Dans sa dernière œuvre When I Count, There Are Only You... But When I Look,There Is Only a Shadow (2011-2013), Lashai juxtapose les Désastres de Goya à ses projections vidéos. À la fois subtiles et subversives, ces installations audio-visuelles jettent un regard critique sur la situation politique ainsi que les conditions de vie difficiles en Iran, d’où la grande pertinence de son œuvre.
Témoignages
L’exposition Témoignages établit un lien étroit entre le passé et le présent. Nés à quelque 200 ans d’intervalle, Goya et Lashai s’imposent comme chroniqueurs de guerre de leurs pays respectifs. Forcés de travailler dans des conditions d’oppression et de censure suite aux bouleversements dans leurs pays, ils font usage de l’art, voire de l’humour pour dénoncer les injustices dont ils ont été témoins, faisant appel à une variété de techniques et d’éléments du langage visuel.
Par cette mise en dialogue des œuvres de Goya et de Lashai, le Musée des Beaux-Arts encourageait les visiteurs à participer au changement positif dans la société actuelle en tirant des leçons du passé. Deux siècles se sont écoulés depuis la réalisation des Désastres, pourtant le message n’a rien perdu de sa résonance, notamment à la lumière des nombreux conflits de ces dernières années...