Le Jongleur, 1923

Le Jongleur est le point culminant de la vision personnelle d'Oscar Jespers sur le cubisme. La massivité et l'espièglerie atteignent ici une harmonie absolue. Avec ses formes cylindriques, la sculpture se rapproche davantage du "tubisme" de Léger que du cubisme analytique de Braque et Picasso. Les jambes et le torse sont constitués de volumes légèrement arrondis qui ne sont interrompus que par la bande massive de la ceinture. La physionomie du jongleur est également fortement abstraite. La vague suggestion d'un visage avec un nez et un œil est à moitié cachée derrière la main et la balle de jonglage. L'utilisation de la polychromie est unique dans l'œuvre de Jespers. La combinaison harmonieuse de couleurs mates et saturées intensifie la dynamique et rompt avec le caractère monolithique de la sculpture. Comme de nombreux autres artistes modernes, Jespers était fasciné par les "artistes de cirque" tels que les équilibristes, les trapézistes et les jongleurs, car, comme il sied aux "vrais" artistes, ils ne sont pas liés par les lois de la nature et peuvent facilement échapper à la gravité. Il a lui-même appelé cette sculpture un "équilibreur". Une référence subtile à l'activité de l'artiste lui-même, qui recherche également l'harmonie et l'équilibre dans son travail. Et pour un sculpteur, ce n'est pas seulement pour des raisons esthétiques mais aussi pour des raisons de stabilité.